- « Regardez-moi tout cet argent ! Alors, c'est de là que vient la richesse d'Athènes… »
- – Kassandra en arrivant sur les lieux.[src]
La mine d'argent de Lavrio était une mine d'exploitation d'argent située à Lavrio, au centre de la Montagne d'argent, en Attique.
Pendant la guerre du Péloponnèse, la misthios Kassandra s'y rendit, tua le capitaine, brûla les ravitaillements de guerre et pilla les trésors.[1]
Histoire[]
Aperçu[]
La Grèce antique ne comptait que très peu de mines d'argent, ce qui en augmentait l'importance. Athènes commença à exploiter les mines du Laurion à la fin du VIe siècle avant l'ère commune et utilisa leur argent métal pour battre sa monnaie. La production augmenta considérablement vers -485, date à laquelle fut découverte une veine particulièrement riche. L'abondance d'argent de ces mines fit d'Athènes une des plus riches cités de Grèce. Elles fournirent également les moyens nécessaires à la construction d'une flotte assez vaste pour vaincre les Perses à la bataille de Salamine. Pour résumer, les mines du Laurion jouèrent un rôle crucial dans l'émergence d'Athènes en tant que superpuissance grecque.[2]
Les pièces de monnaie sont apparues à Athènes vers 530 avant notre ère. Les ressources abondantes provenant des mines du Laurion permirent à la cité de battre quantité de pièces renommées pour la qualité de leur argent. À l'instar des monnaies modernes, il existait des pièces athéniennes de valeur et de poids variés. La plus frappée était la tétradrachme, qui pesait 17,20 grammes. Cette pièce, comme son nom l'indique, valait quatre (tétra) drachmes. Les pièces les plus petites, et les plus utilisées à l'agora, étaient la triobole (2,15 g), l'obole (0,72 g) et l'hémiobole (0,36 g).[2]
Une mine antique[]
L'exploitation des mines exigeait une force de travail considérable. Pour y parvenir en minimisant les coûts, la cité d'Athènes vendait des concessions à des citoyens… qui faisaient faire le travail par des esclaves et des journaliers miséreux. Au Ve siècle avant notre ère, on estime qu'entre 10 000 et 30 000 ouvriers s'épuisaient simultanément à la tâche dans les mines du Laurion. Ensemble, ces ouvriers parvenaient à produire une vingtaine de tonnes d'argent par an.[2]
Les Grecs de l'Antiquité extrayaient divers métaux : or, argent, cuivre, étain, plomb, fer et mercure. Les métaux les plus précieux, l'argent et l'or, étaient appréciés pour leur qualité et leur rareté. On les utilisait pour battre monnaie, mais aussi pour fabriquer des bijoux, des objets de luxe et même des statues comme celle en or et ivoire d'Athéna Parthénos. Pour la plupart des métaux, le commerce s'effectuait à l'aide de lingots.[2]
Extraction du minerai[]
L'activité minière du Laurion comptait deux étapes. Il s'agissait d'extraire le minerai puis de l'affiner. Il fallait environ seize kilos de minerai brut pour produire une seule drachme d'argent pur pesant quatre grammes. Des objets retrouvés dans les mines nous éclairent sur les différentes étapes du processus d'extraction. Des galeries étaient creusées afin de suivre les veines de minerai. Elles étaient exiguës et n'offraient guère de place aux ouvriers. Elles étaient aussi taillées à la main et on estime qu'il fallait plusieurs jours pour progresser de quelques centimètres. Lorsque les galeries atteignaient finalement les veines, le minerai était extrait puis broyé dans un mortier afin de le préparer au lavage.[2]
Pendant la guerre du Péloponnèse, les Spartiates occupèrent et fortifièrent la Décélie, ce qui priva Athènes de l'accès à de nombreuses routes. Les esclaves du Laurion saisirent cette occasion pour s'enfuir, et quelque 20 000 d'entre eux quittèrent les mines. Toute extraction d'argent cessa dans le Laurion.[2]
La fermeture des mines du Laurion eut un effet majeur sur l'économie athénienne. Les coffres de son trésor se vidèrent progressivement et elle se retrouva dans l'impossibilité de reconstruire sa flotte. Ainsi démunie, Athènes fut dans l'obligation de fondre deux statues en or d'Athéna Nikè pour battre des pièces d'or. La cité produisit aussi des pièces de bronze recouvertes d'un mince placage d'argent afin de remplacer, en les imitant, ses tétradrachmes, ce que moqua l'auteur comique Aristophane.[2]
En -404, à l'issue de la guerre du Péloponnèse, l'exploitation de mines d'argent était presque nulle. Ce n'est que plusieurs décennies plus tard, en -370, que des entrepreneurs louèrent de nouveau les mines. Mais l'acquisition par Alexandre le Grand de grandes quantités d'argent dans le butin pris sur les Perses fit tellement chuter le cours de l'argent métal que les mines perdirent leur rentabilité.[2]
Lavoirs[]
Les ouvriers utilisaient des lavoirs pour séparer le minerai de la roche. L'opération de lavage réclamait beaucoup d'eau, or le Laurion était une région très aride. Il fallut donc créer des citernes dans la zone d'extraction afin de récupérer et conserver l'eau de pluie. Lorsqu'ils disposaient d'assez d'eau, les ouvriers la versaient dans des sortes d'auges en bois contenant roche et minerai. Le courant séparait les grains de roche du minerai, plus lourd, et ce dernier aboutissait dans des creux situés dans le fond de l'auge. Le minerai ainsi nettoyé était récupéré pour affinage et l'eau était renvoyée dans une citerne pour être réutilisée ultérieurement.[2]
L'emploi d'eau pour séparer le minerai de la roche est toujours pratiqué par les chercheurs d'or modernes.[2]
Fusion et coupellation[]
Une fois propre et sec, le minerai était prêt à être fondu. Le but était d'isoler l'argent du minerai. Pour ce faire, le minerai était placé dans un four conique rempli de charbon de bois. Des soufflets alimentaient le four en air afin de contrôler la température. À l'intérieur, le minerai brûlait en émettant une fumée toxique qui était évacuée par une cheminée. Finalement, l'alliage d'argent était séparé des "crasses" et récupéré pour la dernière étape de l'affinage : la coupellation. La coupellation séparait de l'argent le plomb qui pouvait subsister. L'alliage fondu était placé dans une coupelle, un bol absorbant fait de cendres d'os. Cette coupelle était placée dans un four où elle absorbait le plomb pour ne laisser que l'argent.[2]
Les fourneaux utilisés pour la fusion et la coupellation exigeaient des quantités énormes de combustible. D'après les valeurs des mines d'argent sud-américaines exploitées dans des conditions semblables, on estime que les mines grecques de l'Antiquité consommaient 10 000 tonnes de charbon de bois pour produire une tonne d'argent.[2]
Travail[]
Lorsque les mines du Laurion appartenaient à Athènes, la cité accordait souvent, contre rémunération, des concessions à des citoyens qui exploitaient les lieux pour trois à dix ans. Ces citoyens y faisaient travailler des esclaves et des hommes libres mais pauvres. L'espérance de vie des ouvriers était très faible, de trois à cinq ans, en raison des conditions de travail. Les risques majeurs étaient les vapeurs toxiques de plomb et la poussière omniprésente dans les galeries. Ils étaient en revanche bien nourris de manière à pouvoir travailler, et leurs efforts permettaient d'extraire, estime-t-on, quelque vingt tonnes d'argent par an.[2]
L'homme politique athénien Nicias acheta un jour un esclave du nom de Sosias pour le prix d'un talent, c'est-à-dire 6 000 drachmes, soit trente à quarante fois le prix normal d'un esclave. Si Sosias valait autant, c'est parce qu'il était expert dans la découverte de veines d'argent. Nicias plaça Sosias à la tête du millier d'esclaves qui travaillaient déjà pour lui dans les mines du Laurion. Nicias fit un investissement avisé, car selon Lysias, son activité minière finit par lui rapporter cent talents.[2]
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